Peurs et Phobies | Fin

De quel type de sécurité une personne phobique a-t-elle besoin ?

peurs et phobies

Il y a chez tous les phobiques une atteinte profonde de l’amour et de l’estime de soi – moins vous vous aimez, et moins vous vous sentez en sécurité. Par conséquent, toutes les expériences qui redorent le blason de notre narcissisme – tomber amoureux, voir ses qualités reconnues… – peuvent alléger une phobie. Mais aimer peut, à long terme, se révéler dramatique, car la personne phobique est souvent tentée de fusionner avec son partenaire et de s’imaginer qu’elle n’est rien sans lui.
Ce qui, généralement, se révèle inexact. En effet, paradoxalement, c’est dans la solitude que la personne phobique se reconstruit le plus facilement.

Conseils à l’entourage

Pensez à vos propres peurs – vous en avez forcément – avant de vous moquer de celui qui tremble devant une araignée. Inutile de le contraindre ou de lui faire une mauvaise blague : il transformera sa peur en hostilité à votre égard, plutôt que de réfléchir sur lui ; En revanche, pas question de se sacrifier et de renoncer aux sorties en plein air. A force de voir les autres prendre du bon temps, il lui prendra peut-être l’envie d’en finir avec ses propres peurs pour partager ces moments de plaisir.

Ne pas dissimuler

D’un point de vue génétique, il semblerait en effet que le seuil d’acceptation physiologique et émotionnel de la peur varie d’un individu à l’autre. Dans cette perspective, les peureux seraient en réalité… des allergiques à la peur : s’ils paniquent à l’idée de prendre l’avion, ils redoutent plus que tout de ressentir les manifestations de la panique, convaincus qu’elle aura raison d’eux.

Leur fragilité constitutive serait ensuite renforcée par des expériences malheureuses ou par une éducation qui surestime les dangers du monde et sous-estime leur capacité à y faire face. Il n’est pas une peur que l’on ne puisse surmonter, même si son objet (les serpents, le regard des autres ou la mort) ne peut être effacé. Encore faut-il se résoudre à s’attaquer au problème.

Malheureusement, le principal ennemi des grands anxieux et des phobiques, c’est la honte. Outre qu’ils consacrent une énergie colossale à éviter les situations anxiogènes, ils se compliquent terriblement l’existence en essayant de dissimuler leur peur à leur entourage. Leur vie devient ainsi une suite d’occasions manquées (un déplacement professionnel que l’on refuse par crainte de l’avion, un rendez-vous galant que l’on décline par peur de paraître idiot…) et beaucoup se réfugient dans la consommation d’alcool ou de psychotropes.

Or, on est aussi peu responsable d’une peur maladive qu’on le serait de son diabète. En revanche, ce dont on peut prendre la responsabilité, c’est de se soigner.

S’exprimer

Parler de ses peurs permet de les dédramatiser. D’abord, parce que l’on a de fortes chances de constater que l’on n’est pas aussi seul qu’on le pensait. Ensuite, parce qu’il s’agit de sortir d’un monologue dans lequel on produit des pensées plus terrifiantes les unes que les autres, auxquelles on apporte le plus souvent des réponses décourageantes (« Je ne m’en sortirai jamais, ce sera encore pire… »). Enfin, parce que ceux qui, dans notre entourage, sont parvenus à surmonter leur trac, leur phobie ou leur anxiété, ne manqueront pas de nous faire bénéficier de leurs stratégies. Ou de nous communiquer les coordonnées de leur thérapeute.

Réfléchir au pire

Les peureux croient connaître précisément l’objet de leur peur. En réalité, ils n’ont qu’une idée imprécise de ce qui pourrait réellement se produire s’ils étaient confrontés à ce qui les angoisse. Parce que la simple représentation mentale de l’objet ou de la situation phobique suffit à leur donner la chair de poule, ils s’en défendent en détournant immédiatement leurs pensées vers la recherche de solutions (éviter telle rue, appeler pour décommander…). Or, tant qu’il reste flou, le danger paraît insurmontable.

En thérapie, le but du travail cognitif (c’est-à-dire de l’analyse des croyances qui fondent la peur) n’est pas tant de raisonner celui qui souffre de la peur (la petite bête ne va pas manger la grosse) que de l’aider à mettre au jour ce qu’il redoute réellement. Armons-nous donc d’un papier et d’un stylo, et poussons notre scénario catastrophe à son extrémité. Au bout du parcours, on essaiera de débusquer la croyance fondamentale sur laquelle notre peur repose. En définitive, ce sont ces croyances, souvent inconscientes et pas forcément justes, qu’il faudra combattre.

S’exposer, petit à petit

Plus on donne d’informations aux peureux et plus on augmente les chances d’anéantir les fondements irrationnels de leurs peurs. Cependant, la seule argumentation ne suffit pas. Car la réaction physiologique de terreur se niche dans une zone du cerveau (l’hippocampe et l’amygdale) qui n’est pas celle de l’intelligence rationnelle. C’est cette zone archaïque qu’il faut remuer pour en désincarcérer la peur. Plutôt que de la fuir, il faut au contraire accepter de la ressentir jusqu’à ce qu’elle s’évapore. Donc s’exposer à ce qui la déclenche.

Pas question de se livrer seul à cet exercice. Notamment parce que l’on pourrait se mettre réellement en danger en ne maîtrisant pas nos réactions. Le mieux est donc d’être encadré dans cette démarche par un praticien spécialisé.

L’exposition à l’objet ou à la situation anxiogène se passe de la manière suivante : on commence par dresser la liste, par ordre croissant de terreur, de ce que l’on ne peut absolument pas faire (le simple fait d’imaginer un cheval, de le voir en photo, de sentir son odeur, de vous en approcher, de le toucher, de grimper sur son dos). Cette liste sera celle des défis qu’il faudra relever, d’abord accompagné, puis seul.

Le thérapeute nous aidera à réaliser ces objectifs progressivement, en supportant une exposition suffisamment prolongée (trente à quarante-cinq minutes) pour voir la peur affluer puis refluer comme une vague, sans qu’elle nous achève. Il est indispensable, pour cela, de s’abstenir de recourir à nos défenses habituelles (la fuite, le lavage compulsif, le comportement auquel vous attribuez peut-être une valeur protectrice).

Avec le temps, l’habituation et l’apprentissage de nouvelles stratégies, on verra sa peur diminuer.

La peur aura-t-elle complètement disparu de notre quotidien à l’issue de la thérapie ? Non, et heureusement. Elle sera simplement revenue à un niveau acceptable d’appréhension ou de dégoût.