La vraie cause de nos phobies
Une séparation d’avec la mère trop brutale ou impossible, et le monde nous devient étranger. « L’impossibilité à se séparer d’un lieu connu ou d’un état familier pour rejoindre un univers inconnu qui panique ». C’est la théorie novatrice de la psychanalyste Irène Diamantis pour expliquer ces peurs paniques qui nous empêchent de vivre.
Le ressort de la phobie ne tient pas à la nature de l’objet ou de la situation qui fait peur, mais réside dans une histoire familiale qui empêche la personne d’affronter la vie, avec son cortège de séparations et de changements nécessaires.
Peur panique des voyages en avion, des araignées, du noir, des espaces clos, des soins médicaux, du contact avec les autres… Au-delà de leur très grande diversité, les phobies auraient un point commun : elles proviendraient d’une incapacité à se couper de la mère.
Nous en avons presque tous, qui sont autant de signes de nos difficultés à assumer notre condition d’êtres séparés. Mais pour certains, dans l’enfance, l’épreuve de séparation a été plus complexe. Sans forcément s’en rendre compte, la mère a fait entendre que le monde était dangereux : les gens sont méchants, les chiens mordent… Ou, à cause de sa propre histoire, ses tentatives pour inciter l’enfant à s’autonomiser ont été trop brutales.
Dans les squares, certaines mères portent toujours leurs robes de grossesse, elles se sentent encore enceintes de leur enfant de 3 ans, ne peuvent pas le lâcher. D’autres le tiennent sur leurs genoux, incapables de concevoir qu’il serait plus heureux avec les autres dans le bac à sable. A leur insu, elles font le lit de futures phobies sociales, entraînant une peur panique du regard et du jugement d’autrui, le social étant, par définition, ce qui est hors de la sphère familiale et familière.
Pour les phobiques, la planète entière est un gigantesque utérus maternel, du moins tant que le réel ne leur rappelle pas que c’est faux car il ont un imaginaire foisonnant.. En fait, une partie d’eux-mêmes est fixée au stade où, pour survivre, il faut rester collé à maman. Mais ce lien mental fusionnel n’est pas forcément vécu dans l’amour. Certains nourrissent des fantasmes terrifiants mettant en scène une mère toute-puissante, ayant droit de vie et de mort sur eux.
En fait, ils ont la sensation qu’aucun tiers n’est en mesure de les aider à se séparer d’elle et à affronter le monde. Les phobiques sont enfermés dans leurs cauchemars et y croient sans distance : s’ils prennent un avion, celui-ci va forcément tomber… Une personne en état phobique cesse de raisonner. Si on lui dit qu’il n’y a aucun danger, elle pensera : « Et si, quand même »
L’enfant atteint de phobie scolaire panique à l’idée de se séparer de sa mère, mais souffre aussi d’être incapable de rejoindre les autres enfants. Il se sent amoindri, a honte de lui. Terrifiée à l’idée d’aller de l’avant, la personne phobique sait bien, dans une partie de son psychisme, que demeurer captif de l’univers maternel est encore plus dangereux qu’affronter l’inconnu.